mercredi 28 janvier 2009

Quand une ile mexicaine disparait...

Voici un article paru dans le La Croix du 12 janvier

Des élus mexicains veulent savoir pourquoi l'île de Bermeja a disparu
La disparition d'un récif corallien au large de la presqu'île du Yucatan fait perdre au Mexique des droits sur d'importantes ressources pétrolières. Mexico, de notre correspondant
Six sénateurs mexicains, appartenant au parti au pouvoir (PAN), exigent un rapport détaillé sur la disparition suspecte de l'île de Bermeja, située au large du Yucatan. L'absence de ce récif a permis en effet aux États-Unis de récupérer une zone maritime dans le golfe du Mexique où se trouve un fabuleux gisement pétrolier.

L'île de Bermeja est un récif corallien qui appartient au Mexique depuis le XVIe siècle. Les navigateurs craignaient depuis plusieurs siècles d'y briser la coque de leur navire. Ce confetti au milieu du golfe du Mexique servait à définir le partage des eaux territoriales entre le Mexique et les États-Unis. Mais tout a basculé le jour où des compagnies pétrolières ont découvert, en profondeur, un gisement de pétrole considéré comme un des plus importants du monde, les Hoyos de Dona.

Fabio Barbosa Cano, économiste de l'Université nationale autonome de Mexico, explique que l'existence de cette île est primordiale pour délimiter deux zones : le polygone occidental, en face de l'État du Tamaulipas et du Texas, et le polygone oriental, en face du Yucatan et de La Nouvelle-Orléans. Deux zones en forme de « dona » (les gâteaux ronds américains), dont le potentiel pétrolier est estimé à 22 milliards de barils. Or la situation géographique de l'île de Bermeja permet de définir la frontière nord des eaux mexicaines et de déterminer quelle part de la zone pétrolifère revient à chaque pays.

Pourtant, le 9 juin 2000, à Washington, alors que le Mexique est en pleine campagne en vue d'élections qui mettront fin à 71 ans de monopole du Parti révolutionnaire institutionnel (PRI), les présidents Ernesto Zedillo et Bill Clinton signent, sans publicité, un accord qui ne tient pas compte de l'île, ce qui permet aux États-Unis de récupérer 60 % de la zone pétrolifère des Hoyos de Dona. L'accord ne tient pas compte de l'île pour la bonne raison qu'elle n'existe plus ! Cinq mois avant que ne commencent les réunions discrètes sur le partage de la zone, l'île a disparu.

L'opposition de gauche ainsi qu'un sénateur du PAN, José-Angel Conchello, réclament alors des explications, d'autant que l'entreprise Reading and Bates Corp. perfore déjà cette zone. Mais le sénateur trouvera la mort dans un accident automobile. Pour mettre fin aux spéculations, le gouvernement mexicain envoie un navire océanographique de la marine nationale sur les lieux. Celui-ci revient sans avoir trouvé trace de l'île. Depuis, les autorités restent évasives sur cette disparition, bien qu'elle apparaisse encore sur plusieurs cartes maritimes.

Les géographes expliquent que de petites îles peuvent parfois disparaître. Les géologues avancent l'hypothèse d'un effondrement du plateau continental, mais aucun appareil n'a jamais enregistré la moindre secousse sismique. Aujourd'hui, l'affaire remonte à la surface car six sénateurs se demandent si l'île n'aurait pas été dynamitée. Ils veulent savoir si, à des fins d'enrichissement personnel, des individus sans scrupules n'ont pas cédé au puissant voisin une partie du territoire national.

GOUY Patrice

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